Ah, l'abbé Pierre en hiver 54 ! J'étais dans ma huitième année et mes parents écoutaient à la radio tout ce qu'il disait et faisait. Je ne comprenais pas tou, évidemment. J'avais juste compris qu'il installait des tentes à Paris pour des gens qui avaient froid dans la rue parce qu'ils n'avaient pas de logement et qu'ils pouvaient en mourir. Je voyais ma mère écouter en baissant la tête et mon père bouillir d'indignation.Il était très en colère et disait que c'était honteux de voir ça. Il me faisait un peu peur mais en même temps je me disais que grâce à lui nous avions du bois pour le four de la cuisinière pour avoir bien chaud dans cette pièce principale régulièment chauffée de la maison. Je savais aussi que mon père n'allait pas à la messe le dimanche mais je comprenais bien que l'abbé Pierre avait droit à toute son estime car dans sa colère mon père répétait que ce n'était pas à cet homme de faire tout ça tout seul. Cet hiver là j'ai compris qu'il y avait de graves injustices dans mon pays, que certaines personnes qui auraient dû s'en occuper ne s'en occupaient pas et que l'abbé Pierre, lui ,il faisait tout ce qu'il pouvait et que mon père était d'accord pour l'aider même s'il n'allait pas à la messe comme tout le monde. Alors si des gens qui n'étaient pas d'accord à propos de la messe étaient quand même d'accord pour aider ceux qui avaient froid dans la rue c'était rassurant et la colère de mon père me faisait tout d'un coup moins peur. Plus tard j'ai compris qu'il étaient généreux l'un et l'autre et rien que d'y penser j'ai chaud au coeur. Merci la blonde d'avoir réveillé ce souvenir qui m'a beaucoup apporté sans que je m'en rende compte vraiment car je ressentais les choses sans pouvoir les expliquer.