Nous avons regardé La guerre des boutons de Yann Samuell car j'avais acheté le DVD à un prix bradé dans une gondole du supermarché. Le roman de Louis Pergaud Pergaud dont je recommande l'édition illustrée par Claude Lapointe chez Gallimard, collection folio junior est transposé dans le contexte des années 60 avec la guerre d'Algérie en arrière plan.
Tout en sachant que l'adaptation à l'écran est tout à fait autre chose j'ai été fortement déçue dès le départ puis cette première impression a progressivement évolué vers une certaine sympathie concernant le message féministe et pacifiste du réalisateur.
Les séquences accélérées du début, les échanges outranciers des deux instituteurs et quelques autres détails m'ont paru excessifs. J'avais 14 ans en 1960 et j'ai noté des anachronismes. Une friandise à deux sous, cela n'existait plus dans ces années 60. On parlait en francs,anciens ou nouveaux car nous avions du mal à nous y mettre, et en centimes mais jamais en sous. De même aborder la métaphore et l'oxymore au cours moyen me laisse dubitative même si j'ai bénéficié de deux maîtres sachant concilier l'apprentissage rigoureux des connaissances reposant sur le raisonnement et le par cœur et les techniques de Célestin Freinet. J'ai d'ailleurs pensé à Elise Freinet, son épouse, auteur d'un ouvrage presque introuvable L'art enfantin, en voyant les superbes dessins à la craie dans la cour de l'école.
Par contre, j'ai apprécié l'exactitude des décors, des objets et des vêtements des enfants, les blouses des filles en particulier. Le curé est dévoué comme celui que j'ai connu dans mon enfance même si je n'allais pas au catéchisme, et l'instituteur est au service des plus démunis à une époque où l'école joue son rôle d'ascenseur social. Je n'ai pas oublié et j'en témoigne dans ce que j'ai pu écrire. J'ai apprécié aussi à certains moments le jeu émouvant des enfants quand ils sont tourmentés.
Je suis une admiratrice de Louis Pergaud qui avait l'étoffe d'un grand écrivain mais la folie de la guerre 14-18 en a décidé autrement. J'aime beaucoup le film d'Yves Robert ami du scénariste François Boyer dont j'ai étudié les six romans, la pièce de théâtre et visionné la plupart des films dont il a écrit les scénarios et les dialogues.
Le film de Yann Samuell s'écarte volontairement de tout ce que j'ai étudié et s'accorde la liberté de poser des questions auxquelles on ne pensait pas à l'époque comme la place des femmes dans une société qui change. Et là j'ai pensé à une phrase de Freinet : " L'avenir n'appartient pas à ceux qui répètent sagement des schémas appris, mais à ceux qui inventent les questions qui n'avaient pas encore été posées."