Jorge Semprun est né en 1923 à Madrid. Il a connu la guerre d'Espagne, la résistance et la vie dans les camps de déportation. Il a attendu 17 ans avant d'écrire, en français, ce livre qui relate son voyage vers les camps, fil conducteur du témoignage où se télescopent plusieurs moments de sa vie ce qui exige du lecteur une attention soutenue. Il y a donc le temps du voyage interminable et insoutenable dans le wagon. Il y a le temps d'avant le voyage avec les souvenirs de la guerre d'Espagne et la fuite en France ou le massacre du maquis,. Il y a le temps de l'arrivée au camp avec les cadavres du wagon et le massacre des enfants juifs. Il y a le temps de la libération du camp : il constate que les gens des habitations voisines pouvaient tout voir. Il contacte les survivants du maquis et confronte les témoignages pour retrouver désespérément la trace de Hans qui ne voulait pas mourir simplement parce qu'il était juif et est sans mort en couvrant ses compagnons. Il y a enfin le temps de l'écriture quand les mots sont là pour aider à évacuer l'horreur et faire la lumière sur l'essentiel et construire l'oeuvre d'art.
On ne ressort pas indemme de la lecture d'un tel ouvrage et c'est mon vieil instituteur âgé de 87 ans, lui-même ancien déporté, qui me l'a fait connaître.