Adapter Proust à l'écran est une entreprise difficile. Contrairement à ce qu'affirment certains critiques j'avais aimé celle de Volker Schlöndorff en 1984 mettant en images le ridicule et la décrépitude d'une classe sociale à la veille de la première guerre mondiale.
Hier soir nous avons regardé sur FR3 la première partie de l'adaptation de Nina Companeez. Il n'y a pas d'intrigue véritable pour capter l'attention du spectateur sinon des images superbes nous plongeant dans le quotidien d'une classe sociale mondaine oisive, arrogante et dont la plupart des membres sont stupides. D'ailleurs les différentes classes sociales se côtoient mais ne se fréquentent pas. Les cochers des fiacres et les domestiques doivent être disponibles jour et nuit et en toutes circonstances. Le narrateur voit tout entend tout. L'intrigue finalement c'est la découverte et la prise de conscience très subtile par le narrateur, du monde qui l'entoure avec ses turpitudes et ses préjugés mais aussi ses beautés.
Ironie de la programmation.
Aussitôt cette adaptation un débat réfléchissait sur l'actualité étrangère et s'interrogeait sur la différence entre révolte et révolution. A un certain moment, l'un des intervenants précisa que les principes de la révolution de 1789 avaient eu bien du mal à se stabiliser puisqu'il y avait eu ensuite le premier empire, la restauration puis le second empire pour arriver enfin à la stabilité de la troisième république. Donc, une révolution et tous les changements que cela suppose dans les mentalités et les institutions plus démocratiques qui en découlent, ça prend du temps, beaucoup de temps. Comme je venais de voir, juste avant, sur la même chaîne , les salons de la noblesse oisive sous la troisième république, je me suis dit qu'effectivement Proust avait lui aussi observé que ça prenait du temps. Ces gens là ne font rien, rien du tout sinon s'inviter à souper, mettre de beaux habits,
se promener ou aller à l'opéra. Rien ne justifie leurs privilèges sous cette troisième république. J'ai pensé à un roman où les personnages se comportent de la même façon : "Les égarements du cœur et de l'esprit " de Crébillon fils sauf que le roman de Crébillon se passe avant 1789.
Finalement, la télé ça peut donner envie de relire les bons auteurs et de s'informer davantage pour mieux réfléchir.