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  A la découverte deLa République de Platon.

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Charpentier Hélène




Féminin
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MessageSujet: A la découverte deLa République de Platon.     A la découverte deLa République de Platon. Icon_minitimeVen 16 Mar - 14:22

Passages choisis 090801
La république [1]

par Platon

Éditions GF Flammarion © 2004
La tyrannie

* * *
La tyrannie [2]

p. 431

― Vois donc, mon cher camarade, de quelle manière se produit le régime tyrannique. Il est évident, en effet, qu'il résulte en gros d'une transformation de la démocratie.

― C'est évident.

― Est-ce que le mode de transformation de la démocratie à la tyrannie n'est pas le même que de l'oligarchie à la démocratie ? [562b]

― Comment ?

― Le bien qu'on mettait de l'avant, dis-je, et qui constituait le but en vue duquel l'oligarchie a été instaurée, c'est la quête de toujours plus de richesse, n'est-ce pas ?

― Si.

― Or, c'est l'appétit insatiable de richesse et, découlant de cette quête de la richesse, la négligence de tout le reste, qui ont conduit à la ruine de cette constitution.

― C'est vrai, dit-il.

― Eh bien, n'est-ce pas justement l'appétit insatiable de ce que la démocratie considère comme son bien qui va conduire à sa perte ?

― Qu'est-ce qu'elle considère à ton avis comme son bien?

― La liberté, répondis-je. Ce bien-là, tu entendras dire dans une cité gouvernée démocratiquement [562c] que c'est le bien le plus beau et que pour cette raison, la cité démocratique est la seule où un homme libre par sa naissance jugera digne de s'établir.

― Cette affirmation, dit-il, on l'entend souvent, en effet.

― Eh bien, repris-je, et c'est là ce que je m'apprêtais à dire, n'est-ce pas le désir insatiable de ce bien et la négligence de tout le reste qui déstabilisent cette constitution politique et la mettent en situation de recourir nécessairement à la tyrannie ?

― Comment ? dit-il.

― Quand une cité gouvernée démocratiquement et assoiffée de liberté tombe par hasard sous la coupe de mauvais échansons [562d] et s'enivre du vin pur de la liberté, dépassant les limites de la mesure, alors ceux qui sont au pouvoir, s'ils ne sont pas entièrement complaisants et ne lui accordent pas une pleine liberté, elle les met en accusation pour les châtier comme des criminels et des oligarques.

― Voilà ce que la cité fait, dit-il.

― Quant à ceux, repris-je, qui respectent l'autorité des gouvernants, on les invective en les traitant d'hommes serviles et de vauriens, mais les gouvernants qui passent pour des gouvernés, et les gouvernés qui passent pour des gouvernants, ce sont eux dont on fait l'éloge en privé comme en public, ce sont eux auxquels on accorde du respect. N'est-il pas inévitable que dans une telle [562e] cité l'esprit de liberté [VIII-71] s'étende à tout ?

― Si, nécessairement.

-Et qu'il se propage, cher ami, continuai-je, jusqu'à l'intérieur des maisons privées, de telle sorte qu'au bout du compte l'anarchie s'implante même chez les animaux sauvages ?

― De quoi parlons-nous ici ? demanda-t-il.

― Vois, par exemple, quand le père prend l'habitude de se comporter comme s'il était semblable à son enfant et se met à craindre ses fils, et réciproquement quand le fils se fait l'égal de son père et ne manifeste plus aucun respect ni soumission à l'endroit de ses parents. Dans quel but ? Devenir libre. Et pareillement pour le métèque [563a] qui se fait l'égal du citoyen, et le citoyen l'égal du métèque, et de même pour l'étranger.

― Voilà bien comment les choses se passent, dit-il.

― Oui, voilà les faits, continuai-je, et il y en a d'autres de même nature, mais de moindre importance. Dans ce régime, le maître craint ceux qui sont placés sous sa gouverne et il est complaisant à leur endroit. Les élèves, eux, ont peu de respect pour les maîtres, et pas davantage pour leurs pédagogues [VIII-72]. On peut dire que généralement les jeunes conforment leurs gestes au modèle des plus vieux et ils rivalisent avec eux en paroles et en actions. De leur côté, les vieux sont racoleurs, ils se répandent en gentillesses et en amabilités auprès des jeunes [563b], allant jusqu'à les imiter par crainte de paraître antipathiques et autoritaires.

― Oui, exactement, dit-il.

― Et, mon ami, repris-je, le point limite de cette liberté de la masse est atteint dans une cité de ce genre, quand les hommes et les femmes vendus en esclavage ne sont pas moins libres que ceux qui les achètent. Et nous allions presque oublier de mentionner l'égalité de droits [VIII-73] et la liberté qui ont cours dans les rapports entre les femmes et les hommes, et entre les hommes et les femmes.

― Eh bien, ne faut-il pas suivre Eschyle [VIII-74], demanda-t-il, [563c] quand il propose que "nous disions ce qui à l'instant nous venait sur la langue" ?

― Certes, dis-je, et c'est justement ce que je m'apprêtais à dire. Dans cette cité, en effet, les animaux qui sont au service des hommes sont plus libres que dans une autre. On ne le croira pas tant qu'on ne l'aura pas observé. C'est là que les chiennes, pour suivre le proverbe, deviennent absolument semblables à leurs maîtresses, et les chevaux comme les ânes, habitués à se déplacer fièrement en toute liberté, bousculent à tout coup le passant qu'ils trouvent sur leur chemin, si par mégarde celui-ci ne se range pas. Et tout le reste est à l'avenant, [563d] une pléthore de liberté !

― Tu exprimes, s'exclama-t-il, ce à quoi je songeais. Quand il m'arrive de me mettre en route pour la campagne, j'en fais moi-même l'expérience.

― Et la conséquence principale de tous ces facteurs conjugués, repris-je, tu peux la concevoir : tout cela rend l'esprit des citoyens irritable, avec le résultat qu'ils se fâchent et se révoltent à la moindre occasion où se présente pour eux un élément de contrainte. Tu sais bien qu'au bout du compte, d'une certaine manière, ils ne manifestent plus aucun respect ni pour les lois écrites, ni pour les lois non écrites, tant ils sont désireux que personne ne soit, de quelque façon, [563e] leur maître.

― Je le sais trop bien, dit-il.

― Tel est donc, mon ami, repris-je, l'amorce belle et juvénile, à partir de laquelle se développe selon moi la tyrannie.

― Juvénile, pour sûr, dit-il, mais que se produit-il ensuite ?

― La même maladie, répondis-je, qui s'est manifestée dans l'oligarchie et qui a conduit à sa perte, se développe ici en raison de la permissivité [VIII-75] qui se répand avec une ampleur et une force plus considérables, au point d'asservir la démocratie. Car de fait une action démesurée dans un sens a tendance à provoquer une transformation en sens contraire, que ce soit dans les saisons, [564a], dans la végétation ou dans les organismes, et cela ne vaut pas moins pour les constitutions politiques.

― Vraisemblablement, dit-il.

― Une liberté excessive ne peut donc apparemment se muer qu'en une servitude excessive, et cela aussi bien pour l'individu que pour la cité.

― C'est en effet probable.

― Il est dès lors vraisemblable, repris-je, que la tyrannie ne puisse prendre forme [VIII-76] à partir d'aucune autre constitution politique que la démocratie, la servitude la plus étendue et la plus brutale se développant, à mon avis, à partir de la liberté portée à son point le plus extrême.
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