Voici quelques extraits du Livre de San Michele
Voici un passage du chapitre VII intitulé Laponie. Le narrateur assoupi voit surgir un gnome qui lui parle de son enfance, de ses parents,de ses frères et sœurs et en particulier de son étrange nourrice qui lui appris à vivre avec les animaux : " Elle t'amenait toutes sortes d'animaux pour que tu joues avec, des chauves souris, des hérissons, des écureuils, des rats, des serpents, des chouettes et des corbeaux. Je l'ai vue une fois de mes propres yeux, couper la gorge d'un corbeau et verser quelques gouttes de son sang dans ton lait.(...) La plupart de tes ennuis venaient de tes bêtes. ta chambre était pleine de toutes sortes d’animaux, tu couchais avec eux dans ton lit. Ne te rappelles-tu pas avoir été rossé impitoyablement pour avoir couvé des œufs ? Tous les œufs d'oiseaux que tu pouvais dénicher, tu tâchais de les faire éclore dans ton lit. (...) Ne te rappelles-tu pas le soir que tes parents rentrèrent tard d'une soirée et trouvèrent ta sœur en chemise de nuit , assise sur la table, sous un parapluie, hurlant de terreur ? Toutes le bêtes s'étaient échappées de ta chambre, une chauve-souris avait ses griffes dans les cheveux de ta soeur, tous tes serpents, tes crapauds, tes rats, grouillaient par terre et dans ton lit ils trouvèrent une nichée de souris ? Ton père te donna une formidable raclée. Tu te jetas sur lui et mordis ton propre père à la main."
Dans le chapitre XXI, intitulé La régate, Axel Munthe brosse avec émotion et respect le portrait d'un homme exemplaire, humble fossoyeur, Pacciale.
" Il avait été oublié de tous. mais il ne le sera jamais de moi. je me le rappellerai toujours comme le plus honnête homme, le plus droit, le plus ingénu que j'aie jamais rencontré en aucun pays, dans aucune position sociale; doux comme un enfant. Ses propres enfants m'avaient dit que jamais ils ne lui avaient entendu dire un mot rude ou méchant à leur mère ou à eux-mêmes. Il était bon pour les animaux, il avait l'habitude de descendre de de pleines poches de miettes de pain pour nourrir des oiseaux de sa vigne, il était le seul homme de l'île qui n'eût jamais piégé un oiseau ou rossé un âne. Un vieux serviteur dévoué abolit le nom de maître, il était devenu mon ami, l'honneur était pour moi, il était bien meilleur que moi. Bien qu'il appartînt à un autre monde qui m'était presque inconnu, nous nous comprenions parfaitement. Durant les longs jours et les longues nuits où nous fûmes seuls sur la mer, il m'apprit bien des choses que je n'avais point lues dans les livres ni entendues sur les lèvres d'autres hommes. C'était un taciturne. La mer lui avait depuis longtemps enseigné son silence. "
Enfin les dernières pages de l'épilogue Dans la vieille tour, expriment le doute d'un chrétien marqué par le cataclysme de la première guerre mondiale. Le livre de San Michele a été publié en 1929. Arrivé au Paradis narrateur écoute un vieil archange évoquant les efforts de Dieu pour rendre les hommes meilleurs après le déluge d'où devait émerger un monde meilleur : " Dieu continuait à regarder avec une patience infinie, se refusant à frapper, désireux jusqu'au bout de pardonner. Il fit même descendre son propre Fils dans ce monde pervers, pour enseigner aux hommes la douceur de l'amour, et pour prier pour eux. Tu sais ce qu'ils lui firent. Bientôt, je tant un défi au ciel, ils ne tardèrent pas à embraser le monde entier de flammes de l'Enfer. Avec une astuce satanique ils forgèrent des armes nouvelles pour s'assassiner les uns les autres. Ils dressèrent la mort à fondre sur leurs demeures du ciel même, ils empoisonnèrent l'air qui fait vivre, avec les vapeurs de l'Enfer. Le grondement du tonnerre de leurs batailles secoua toute la terre. "