San Antonio sur France 5

Il y eu un documentaire sur San Antonio hier sur France 5. Je n'ai pas France 5 mais un ami m'a envoyé l'article du Figaro et on peut retrouver l'émission sur le site de France 5.

J'en connais un qui devrait être intéressé...

Nous avons vu l'émission sur internet. L'évocation de l'écrivain par son gendre, Guy Carlier est émouvante et pudique. On découvre un homme simple, écorché vif, qui se bat avec la langue, a surmonté des épreuves et reste lui-même, envers et contre tout et il nous invite à en faire autant. Comme il le dit, il nous tend un miroir afin que nous puissions nous voir tels que nous sommes sans nous mentir.
Dès que j'ai commencé à le lire, j'ai été frappée par cette volonté de démystifier les imposteurs, les beaux parleurs et les aberrations qui nous pourrissent la vie. Derrière le gros rire il y a l'esprit subversif qui ouvre les yeux sur l'essentiel pour vivre sainement, pleinement et sereinement.

Bizarre, j'ai vraiment du mal à associer Pudique et Carlier
But we'll see

Le 16 décembre 2010, il y a eu un jardin Frédéric Dard qui a été inauguré à Paris.

Tu verras, Carlier n'est pas le seul à donner son point de vue dans ce documentaire. C'est vrai que dans le contexte de l'éducation coincée de l'après-guerre jusqu'aux années 68 -70 et même un peu après, la lecture de San Antonio devait apporter une bouffée d'air frais. Ah si seulement je l'avais découvert plus tôt !
Dans le documentaire j'ai entendu dire par je ne sais plus qui, que cette mentalité coincée et étouffante, venait de la France de Pétain. Oui mais Pétain c'était la mentalité du XIX° et au XIX°, Maupassant donne un bon aperçu d'un état d'esprit salopard. Relisons "Boule de suif ". Un chef d'oeuvre.

Il y a toujours eu des "culs coincés", mais aussi des esprits libres.
Longtemps, trop longtemps, les premiers ont imposé leur vision des choses et de la vie, souvent avec l'aide de l'église.
Espérons que la vision des seconds continuera à se faire une place de plus en plus grande.

Mon père était un esprit libre. Enfant je me souviens d'altercations avec certaines personnes lui reprochant de ne pas penser comme tout le monde à quoi il répondait qu'il avait la volonté de penser par lui-même et il évoquait souvent les moutons de Panurge. Il se méfiait de l'argent comme de la peste et nous vivions correctement en autarcie avec le jardin, le cochon, les poules. Il était fier d'être pauvre et instruit à la fois. Il avait été enfant de choeur, connaissait de nombreux passages de l'Ancien et du nouveau Testament, les prières en latin, la signification des fêtes mais justement, il en avait tellement ingurgité qu'il en avait eu une indigestion. De ce fait il ne voulait pas nous faire subir ce que lui avait subi. Alors forcément, nous étions un peu regardés de travers au village. Ne pas aller au catéchisme, ne pas faire sa communion comme les autres ça se remarquait. Malgré tout, comme nous étions polis, serviables, studieux et que le curé, un bien brave homme, venait boire le café à la maison( en espérant secrètement marier mes parents à l'église un jour ou l'autre) cela s'arrangeait plutôt bien.
Néanmoins, côté sexualité, la culpabilité était solidement installée chez mes parents. On ne parlait pas de ça, ce n'était pas de notre âge, on n'avait pas à poser de questions déplacées etc, etc. L'esprit libre sur ce point n'avait pas franchi le pas et restait prisonnier de la honte du corps inculquée par la famille, l'école, la société et tout ce qu'on voudra. Je n'ai JAMAIS vu mon père en maillot de corps ou en short, même au plus fort de l'été. D'ailleurs l'école laïque rivalisait de pudibonderie avec l'Eglise sur ce point et l'Ecole normale que j'ai fréquentée de 63 à 67 nous surveillait de très près ce qui n'empêchait pas la nature d'imposer sa loi puisque quelques élèves ont été absentes une année pour cause de maternité.
J'ai dû vous raconter que dans les années 50, la directrice de cette école, une vieille fille, interdisait à ses futures institutrices de prendre le même train que les futurs instituteurs. Aberrant. Et en 67-68, dans le village où je venais d'être nommée institutrice, un couple d'instituteurs retraités prétendait que celle qui me précédait ne vivait pas maritalement avec son compagnon car elle couchait en bas et lui à l'étage. Il fallait sauver l'honneur de la profession. En fait, leurs affirmations faisaient rigoler tout le monde.Et peu avant 68, une présentatrice de télé dont mon mari pourrait dire le nom parce que chez nous la télé n'était pas encore achetée, a été renvoyée parce qu'on avait vu ses genoux. Ah la culpabilité avait la peau dure. Quand la carapace a cédé avec mai 68 c'est parti dans tous les sens et mon pauvre papa quand on a acheté la télé en 71 et qu'il a commencé à voir des corps dénudés et des gens au lit, il se mettait en colère et il éteignait le poste. Nous, on se regardait d'un air entendu, sans rien dire, parce que notre papa, né en 1895, on l'aimait, on n'avait rien à lui reprocher et on savait qu'il avait beaucoup enduré dans sa vie et que ce changement brutal était plus difficile pour lui que pour nous.
Inversement, il y a des gens d'Eglise très ouverts et pas du tout coincés. J'ai une amie, camarade de fac, religieuse chez les Carmélites à qui je rends visite depuis 38 ans chaque année qui respire la joie de vivre et l'équilibre. Quand mes enfants étaient petits ils adoraient lui rendre visite car une caisse de jouets, des gâteaux, des boissons et et un coin de jardin les attendaient sans oublier le sourire de l'une ou l'autre religieuse nous ouvrant la porte. Il faut dire qu'elles vendent des couvertures piquées. Dans le commerce,il vaut mieux sourire. D'un autre côté, elles ont choisi cette voie sans doute librement et elles n'emmerdent personne.