L'oeuvre de Maurice Genevoix se compose de ses récits de guerre, regroupés sous le titre de Ceux de 14 ses romans de terroirs et ses romans poétiques.
Voici un passage des récits de guerre où un soldat reprend courage après un profond moment de désespoir.
Genevoix écoute attentivement le soldat Pannechon.
"Seulement l’mauvais, à la guerre, c’est du mauvais d’première, du terrible. Alors voilà : entre deux sales moments, exemple entre un coup d’chien et deux nuits sous la flotte, v’la un tout p’tit peu de bon qui s’glisse, un rien d’bonheur qui montre le bout d’son nez…Mais, mon lieutenant, vous savez aussi bien qu’moi c’qui s’passe ! On l’ pas sitôt vu qu’on court à lui, qu’on s’jette dessus… Ah ! Personne n’est difficile chez nous. Qu’est-ce que ça fait qu’on soye content de rien, pourvu qu’on soye content ?
- Mais Pannechon, c’est justement un des secrets de notre force : avec de toutes petites joies, nous savons faire du bonheur. »
Et Pannechon conclut :
« Vous dites bien ça mon lieutenant. Alors quand on a eu mal jusqu’à descendre au fond d’son courage, comme desfois, comme la nuit dernière, suffit d’une miette de joie pour nous r’donner goût à la vie. Est-ce qu’on a tellement d’force qu’on aye le droit d’la gaspiller ? On n’est qu’des hommes, n’est-ce pas mon lieutenant ? »
(Ceux de 14. Nuits de guerre. Maurice Genevoix. Edition Flammarion 1950 reprise dans la collection Points aux éditions du Seuil, page 287.)